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L’ARA : s’y intéresser avant qu’elle ne s’intéresse à vous !
L’ARA, c’est quoi ?
Un nouvel acronyme pour désigner l’audience de règlement amiable, encadrée par les articles 774-1 à 774-4 du Code de procédure civile, entrés en vigueur le 1er novembre 2023.
Rien de nouveau sous le soleil, me direz-vous, puisque l’ARA semble être ni plus ni moins qu’une résurgence de l’office de conciliation du juge déjà prévu par les dispositions de l’article 21 du Code de procédure civile : « Il entre dans la mission du juge de concilier les parties. »…
Sauf que les nouveaux textes semblent, en réalité, aller beaucoup plus loin, notamment à deux égards :
- Les dispositions de l’article 774-3 prévoit que la convocation adressée aux parties précise expressément qu’elles doivent « comparaître en personne ». Ce texte précise que lorsque les parties ne sont pas dispensées de représentation obligatoire, les parties comparaissent assistées de leur avocat. Dès lors, les parties ont l’obligation de comparaître en personne, ce qui est de nature à véritablement favoriser un rapprochement entre elles.
- Les dispositions de l’article 774-2 précisent que l’ARA a notamment pour finalité l’évaluation des « besoins, positions et intérêts respectifs » des parties. Ces termes ne sont pas employés par hasard, et pour les professionnels des processus de solutions négociées (médiation, processus collaboratif, procédure participative), ils font immédiatement écho à leurs compétences relationnelles de négociateurs, c’est-à-dire à la mise en œuvre d’un certain nombre de savoir-être pour permettre le passage des « positions » aux « besoins » et « intérêts respectifs » visés. Cette analyse est d’ailleurs confirmée par la circulaire du 17 octobre 2023 (JUSC2324682C) qui dit expressément que la mission du juge chargé de tenir l’ARA « implique, outre l’écoute des parties, de mêler les techniques de conciliation et de médiation ». Cela impliquera donc, pour les professionnels impliqués, d’être notamment formés à l’écoute active et la reformulation empathique, l’accueil des émotions et l’identification des intérêts, besoins préoccupations, valeurs et moteurs silencieux (« IBPVMs », encore un acronyme !). La présence physique des clients à l’audience étant requise, il sera à mon sens également nécessaire de les avoir bien préparés aux autres solutions amiables qui pourraient être suggérées lors de cette audience, et notamment, selon les cas, la médiation (conventionnelle ou judiciaire), les procédures participative, et le processus collaboratif (cf., en ce sens, l’article 6.1. du R.I.N. et surtout l’article 3.7.1. du Code de déontologie des avocats européens : « L’avocat doit essayer à tout moment de trouver une solution au litige du client qui soit appropriée au coût de l’affaire et il doit lui donner, au moment opportun, les conseils quant à l’opportunité de rechercher un accord ou de recourir à des modes alternatifs de règlement des litiges. »
L’audience de règlement amiable s’inscrit dans un temps plus long que celui consacré à l’examen d’un dossier dans le cadre d’une audience de plaidoirie.
La durée prévisible de l’ARA est dans un premier temps calibrée par le juge saisi du litige, lorsqu’il décide que les parties seront convoquées à une ARA, compte tenu des éléments du dossier dont il a connaissance et de l’avis des parties. Une fois l’ARA engagée, le juge chargé de l’ARA est maître de la gestion de ce temps. Il doit cependant veiller au respect de la charte des temps du greffe.
Il est préconisé toutefois de ne pas dépasser une journée.
Il sera donc nécessaire que l’avocat qui assiste une partie arrive non seulement parfaitement préparé à cette audience, mais également qu’il ait, en amont, bien préparé son client à cette audience d’une nouvelle nature, d’autant que la circulaire précité précise bien que l’ARA « s’inscrit dans un temps plus long que celui consacré à l’examen d’un dossier dans le cadre d’une audience de plaidoirie. […] Il est préconisé toutefois de ne pas dépasser une journée. ».
L’ARA fait ainsi entrer les processus de solutions négociées dans le judiciaire !
Conscient de l’intérêt de cette nouvelle figure de la procédure civile, nous avons décidé de proposer une offre de services en partenariat entre trois avocats et formateurs : @Nadine REY, @Martin LACOUR et @Xavier FRUTON sur laquelle nous vous invitons à réagir !






La réforme de la formation des avocats : l’opinion d’un élève-avocat
D’ici quelques années, sans une réforme importante de l’examen d’entrée pour les avocats, c’est presque 3 600 nouveaux avocats qui rentreront chaque année sur un marché déjà très tendu.1
C’est sur ce postulat, afin de limiter l’explosion du nombre d’avocats, que le rapport de Maitre HAERI recommandait sept modifications :
- Création d’un examen national ;
- Transfert vers les barreaux de l’organisation de l’examen, avec le concours des Universités ;
- Limitation du nombre de passages de l’examen d’entrée au CRFPA ;
- Suppression de l’épreuve écrite de spécialisation lors de la phase d’admissibilité ;
- Suppression de l’épreuve orale de spécialisation lors de la phase d’admission ;
- Fixation d’une moyenne générale à 12/20 pour la phase d’admission ;
- Instauration d’une note éliminatoire au grand oral.2
Faute de trouver un consensus avec les Universités, le Conseil National des Barreaux a préféré « sacrifier » les étudiants passant le CRFPA en adoptant les 10 et 11 octobre dernier une proposition faisant une distinction entre les avocats sur un critère temporel.
En effet, il est prévu qu’à la suite de l’obtention du CAPA, les nouveaux avocats seraient inscrits sur une liste spéciale tenue par l’Ordre. À l’issue d’une période d’un an, placés sous la tutelle d’un avocat référent, ils obtiendraient un certificat de fin de collaboration référendaire établi par l’Ordre.
Il convient de rappeler que le post-stage avait été supprimé3 car beaucoup d’avocats ne jouaient pas le jeu de l’embauche en collaboration, notamment pour des raisons financières. De même, un système pervers s’était mis en place pour accueillir fictivement en collaboration des avocats en cabinet afin de permettre leur installation. Cela aboutissait à deux années de perdues, au nom de la volonté de contrôler les nouveaux entrants sur le marché.
Avec cette proposition du Conseil National des Barreaux, deux questions se posent : la première concernant la rémunération des avocats référendaires, la seconde sur l’établissement du certificat.
La rémunération des presque avocats sera-t-elle affectée par cette réforme ? Seront-ils rémunérés sur la base d’un stage ou celle d’une collaboration ? Cette question est posée légitimement aux futurs cabinets qui les embaucheront, au regard du nombre d’années d’études désormais effectuées par chaque étudiant, face à un marché qui se durcit.
De même, sur quels critères le certificat sera-t-il délivré ? Une mauvaise relation entre l’avocat référendaire et son référent pourrait-elle avoir une influence sur la délivrance de ce dernier ? Les notes obtenues en contrôle continu sur le thème de la déontologie ou de « l’orientation professionnelle » vont-elles influencer l’obtention de ce dernier ?
Autant de questions qui demeurent sans réponses au moment où ces lignes sont écrites, ce qui laisse penser que cette proposition conduit à une réforme mal anticipée. Ce ne sont pas les étudiants ayant réussi les examens du CRFPA. puis du CRFPA qu’il faut sacrifier. Il conviendrait en revanche de renforcer le contrôle de l’accès à la profession dès le passage du CRFPA: l’obtention du CRFPA n’étant que l’aboutissement du professionnalisme enseigné à l’école.
Or, force est de constater que l’école sera réduite à son strict minimum sur une durée d’un an. Dans la proposition des 10 et 11 octobre 2014, l’enseignement serait circonscrit à une durée de 270 à 320 heures sur 4 mois, le stage de six mois en cabinet d’avocat serait conservé, et deux mois seraient consacrés « à des stages de découverte optionnels, aux congés et à la préparation du CAPA. ». Quant au stage PPI de six mois, il deviendrait optionnel.
Une réelle rupture d’égalité entre les étudiants risque de s’opérer à terme avec l’adoption de ce nouveau calendrier : le suivi du stage PPI sera privilégié par les étudiants pouvant y faire face financièrement. De plus, cette optionalité va à l’encontre de la volonté d’ouvrir l’avocat à l’international, mais aussi aux entreprises.4
De même, que restera-t-il des périodes de cours en alternances offertes par les centres de formation tels que l’EFB et l’HEDAC ? En outre, la réduction significative du volume horaire d’enseignement risque de mettre à mal l’objectif de professionnalisation des élèves avocats mise en avant par ces écoles. Ainsi, si une réforme devait avoir lieu, à mon humble avis ce devrait être celle de la généralisation de l’alternance des cours avec un stage concret en cabinet.
S’agissant de la proposition d’un examen national, elle parait aller dans le bon sens : trop d’étudiants font aujourd’hui du forum shopping dans leur inscription universitaire en fonction de la difficulté des sujets tant obligatoires qu’optionnels proposés par chaque IEJ.
Alors oui, cela voudrait dire un transfert vers le CNB et les Barreaux de l’organisation du CRFPA. Cela aura un coût, mais quel est le prix pour protéger l’accès à notre profession ?
Cependant, s’il est souhaitable de contrôler l’entrée de notre profession, il ne faudrait pas être encore plus restrictif en minorant le nombre de passages. Doit-on rappeler que la magistrature permet de passer trois fois le concours d’entrée au premier concours ? De même, tous les autres concours judiciaires ne sont pas soumis à un nombre de passages, tant en ce qui concerne les greffiers, la police, les huissiers et même les notaires.
Alors, ne nous privons pas de futurs brillants confrères qui n’auraient obtenu le concours qu’à la troisième tentative. Ce principe est d’autant plus vrai si nous passons à un examen national qui réduira le nombre d’admissibles et in fine d’admis. De ce fait, il ne sera pas nécessaire de fixer une moyenne générale à 12/20 pour la phase d’admission ou encore instaurer une note éliminatoire au grand oral.
Quant au contenu des examens d’admissibilité et d’admission, il ne semble pas judicieux de supprimer les épreuves de spécialisations. Pourquoi les langues auraient-elles un meilleur accueil que les matières considérées par les étudiants au cours de leurs années universitaires ? De même, pourquoi supprime-t-on les matières choisies tant à l’oral qu’à l’écrit au CRFPA alors qu’il y aurait à terme une obligation de formation dans un domaine choisi durant l’année d’avocat référendaire ?
Ainsi, plusieurs questions se posent, aux avocats ainsi qu’aux candidats au CAPA, sur l’avenir de la profession tant dans son accès que dans sa formation, auxquelles il faudra répondre efficacement. Mais ces questions sont peut-être loin de la seule préoccupation des étudiants inscrits aux IEJ rêvant d’obtenir le fameux sésame qu’est le CRFPA.
Xavier FRUTON
1Avocat en Europe : Les chiffres de la profession de Joseph Jehl, directeur scientifique, Juris- Classeur Droit comparé : « Il y a trois fois plus d’avocats en Allemagne et en Italie qu’en France. »
2Ce rapport a été adopté par le Conseil de l’Ordre de Paris le 12 novembre 2013, Le Bulletin n°32 du 19 novembre 2013
3Progressivement supprimé par le décret n° 2004-1386 à compter de l’année 2005
4 Note de la rédaction : Ce qui explique la réaction du Vice-Bâtonnier face à cette proposition.